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PROGRAMME INONDATIONS PYRENEES JUIN 2013

Méthode photo

La méthode photographique et l'histoire du paysage

Par Jean-Paul Métailié

La méthode utilisée pour cette recherche   est basée sur l'analyse de photographies comparées. ; elle a déjà été décrite ailleurs (Métailié, 1985, 1986, 1987, 1988)et l'on n'en présentera ici qu'un résumé :

- après une collecte systématique des archives photographiques sur le secteur donné, on réitère les clichés anciens à partir des mêmes points de vue, avec le maximum de précision dans la localisation (les premiers plans sont particulièrement importants à conserver) ; une couverture extensive du paysage est nécessaire pour que l'étude soit pertinente ;

- dans un deuxième temps, on établit un premier bilan comparatif général et on effectue une sélection des couples (ou des séries) de photographies les plus intéressants, qui serviront à une étude détaillée ;

- à partir de ces couples ou de ces séries, on commence par une analyse du paysage actuel dans les secteurs photographiés, intégrant des relevés détaillés sur des parcelles où la photocomparaison a mis en évidence une évolution intéressante ; il est primordial de commencer à analyser l'état présent pour arriver ensuite à l'étude du paysage passé conservé par la photo d'archives.

- l'analyse du paysage sur la photographie ancienne est appuyée sur les archives écrites et permet d'en réaliser une critique : relativisation du discours ou au contraire mise en évidence des exactitudes ; le dessin et la cartographie sont ici des outils importants pour approfondir l'analyse paysagère, d'autant plus que de nombreuses photographies de mauvaise qualité technique contiennent des informations importantes, peu visibles sur les clichés mais utilisables dans une représentation graphique ;

- à ce point de l'analyse par photocomparaison, on peut décrire ou extrapoler l'évolution paysagère entre les deux points historiques extrêmes. Les photographies intermédiaires sont importantes pour compléter les données sur cette évolution, mais ce sont les premières missions photographiques aériennes (1942, 1948) qui sont à ce niveau les plus intéressantes : elles permettent de spatialiser les données, de les cartographier avec précision, en accentuant ou relativisant l'importance des phénomènes mis en évidence sur les photos d'archives. Elles sont ainsi un outil précieux d'analyse critique de ces photographies.

Dans l'étude de la vallée de Barèges, la phase finale a constitué en l'élaboration de deux cartes de synthèse sur le paysage de la catastrophe à la fin du XIXème siècle et à la fin du XXème siècle.

La méthode de travail qui a été présentée se nourrit donc d'une accumulation de documents, qui est nécessaire pour pouvoir vérifier, nuancer, corriger ou extrapoler les données acquises : d'une photographie à l'autre, à quelques centaines de mètres de distance, les interprétations peuvent être différentes si l'on n'y prend garde. Le défaut de la démonstration peut donc être la répétition d'images, de paysages offrant des évolutions convergentes, mais il est difficile d'éviter cet écueil si l'on part du principe que la visualisation est indispensable à la réflexion.

Les sources photographiques sur la vallée de Barèges

Le haut Lavedan a bénéficié au XIXème siècle de plusieurs attraits paysagers qui ont provoqué la contitution d'importantes archives photographiques exploitables : le site de Gavarnie en a fait dès la fin du XVIIIème siècle une des vallées les plus célèbres des Pyrénées, et les touristes, pyrénéistes et scientifiques s'y sont succédés sans interruption depuis ; par ailleurs, la virulence des phénomènes catastrophiques menaçant des stations touristiques importantes a entraîné la mise en place précoce d'un périmètre de reboisement et de Restauration des Terrains en Montagne, dont les multiples projets ou réalisations dans la vallée ont été méticuleusement photographiés par les ingénieurs. Les collections qui ont été utilisées sont donc les suivantes :

- les archives photographiques RTM des Hautes-Pyrénées : périmètre du Gave de Pau, séries de Betpouey, Sers, Viella, Gavarnie, séries projetées de Luz, Gèdre, Tourmalet (dans les 400 photos). L'essentiel des clichés est compris entre 1887 et 1914, ce qui correspond à la mise en place des grands périmètres paravalanche et de correction torrentielle. La grande majorité des clichés correspond à des vues de détail des chantiers, mais il y a aussi des vues panoramiques de versants, des images de catastrophes et des clichés de périmètres projetés qui n'ont pas été réalisés. Ces archives sont évidemment fondamentales car elles sont étroitement corrélées à une abondante littérature de rapports, procès-verbaux de reconnaissance, articles, ouvrages, etc. qui représente l'essentiel des données écrites sur le sujet[1].

- les collections des naturalistes et pyrénéistes : dans le cas présent, la collection la plus intéressante est celle de Lucien Briet, conservée au Musée Pyrénéen de Lourdes, qui a laissé de très belles vues de la vallée de Gèdre ; on a également sélectionné des clichés dans les collections de la Société de Géographie de Toulouse, de l'Institut de Géographie Daniel-Faucher, de l'Institut de Géographie de Paris (clichés de de Martonne, Gallois), dans celle de Henri Gaussen. Au total, près de 150 photographies sélectionnées, allant des années 1880 aux années 1950, où dominent les panoramiques et vues de détail de vallées.

- les cartes postales : cette source importante n'est pas à négliger, car on y trouve des vues nombreuses des villages et de leur environnement immédiat, qui ont souvent échappé aux forestiers (préoccupés par leurs chantiers) et aux pyrénéistes et naturalistes (plus intéressés par la haute montagne). Près de 150 cartes ont été sélectionnées, essentiellement de la période 1900-1920, avec quelques vues des années 1950.

Au total on a utilisé pour ce travail prés de 700 clichés, qui sont loin de représenter la totalité des archives photographiques disponibles sur la vallée. La masse potentielle des collections est énorme, dans une région où des milliers de photographes amateurs ou professionnels ont exercé dans les années 1850-1920. Le traitement en serait d'ailleurs totalement ingérable et n'est pas envisageable. Des progrès intéressants seraient évidemment possibles, en particulier en cherchant davantage dans les collections les plus anciennes, pour remonter jusqu'aux années 1850 (diverses collections de cette époque sur les Pyrénées sont conservées à la Bibliothèque Nationale et n'ont pas encore été exploitées). La recherche se poursuit également pour mettre à jour des documents sur les diverses catastrophes dont les dates ont été repérées, et des collections de diverses sociétés de Géographie, de musées et bibliothèques sont actuellement visitées. Ce travail est une opération de recherche en soi, de longue haleine, sur laquelle il n'y a pas lieu ici de s'étendre ; l'important est que l'on peut considérer que l'essentiel du paysage à la fin du XIXème siècle est couvert grâce aux collections qui ont été utilisées.

A partir de cette collection sélectionnée, le travail photographique sur le terrain a abouti, en 1992, à la constitution d'une collection d'environ 800 diapositives couleurs et 500 clichés N&B, fonds documentaire de référence qui a été utilisé pour l'analyse par photocomparaison et l'étude globale du paysage.

La vallée du Haut-Lavedan, correspondant à l'appellation historique de vallée de Barèges, comprend plusieurs sous-ensembles géographiques, que l'on va étudier séparément. Les caractères des risques, leur histoire (cf. chronologie), et l'évolution récente des paysages y sont différents. On peut discerner :

- le bassin de Luz, qui concentre la plupart des villages et offre une large topographie, avec d'amples versants présentant un étagement complet des cultures et des formes d'habitat ; les avalanches ont toujours menacé les villages et hameaux de granges d'altitude, tandis que la torrentialité semble avoir été plutôt limitée à la plaine du Gave et à quelques vallons secondaires (l'Yse).

- la vallée du Bastan, correspondant autrefois au Vic de La Batsus ; vallée encaissée et dominée par de hauts sommets (massifs du Leviste, du Pic du Midi, du Néouvielle), largement déboisée, elle a toujours connu des séries impressionnantes de catastrophes, tant du fait de la torrentialité, des mouvements de terrain, de l'érosion que des avalanches ; elle concentre la plupart des périmètres RTM du haut Lavedan.

- les vallées de Gèdre. Cet ancien hameau de Luz est situé au coeur d'un groupe de vallées abruptes, caractérisées à l'aval -relativement boisé- par une topographie en gorge et vers l'amont -déboisé- par de trés fortes dénivellées, jusqu'aux plus hauts massifs de la chaîne (Campbielh, Troumouse, Estaubé, Néouvielle). Des hameaux habités et des groupes de granges, dispersés et étagés sur les replats glaciaires, diffusent dans tout l'espace de la commune une sensibilité à des risques nombreux et de grande ampleur (avalanches, écroulements, torrentialité, érosions).

- la vallée de Gavarnie. Dans le prolongement de la vallée de Gèdre, dont elle constituait autrefois un hameau, elle représente une accentuation du phénomène de haute montagne que l'on rencontre à Gèdre, dans des hameaux saisonniers comme Héas. Les contrastes topographiques sont encore plus forts, au voisinage des plus hauts massifs des Pyrénées (Vignemale, Mont Perdu), le déboisement est presque total et les risques concernent presque tout l'espace : avalanches surtout, mais aussi torrentialité, écroulements rocheux et érosions.


[1] Pour une analyse de ces collections, voir : Les archives photographiques de la Restauration des Terrains en Montagne dans les Pyrénées, ;AD 31, RTM, CIMA, 1992, 40 p. + annexes.

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  • L’objectif de ce blog scientifique est de s’appuyer sur le témoignage photographique afin d’avoir un panorama le plus complet possible du déroulement des crues de la Garonne, du Gave de Pau et de leurs affluents de juin 2013
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